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« La situation de l’étudiant boursier gabonais en France est aujourd’hui traumatisante »

« La situation de l’étudiant boursier gabonais en France est aujourd’hui traumatisante »
Yebe Kombila du collectif ad hoc des étudiants boursiers du Gabon en France © 2017 D.R./Info241

Les étudiants gabonais en France, boursiers de l’Agence Nationale des Bourses du Gabon (ANBG), sont sans bourse depuis 3 mois. Face à cette situation inédite et extrêmement éprouvante, ces étudiants boursiers de l’ANBG ont décidé de s’organiser en collectif. La rédaction d’Info241 a rencontré Yebe Kombila, initiateur du collectif ad hoc des étudiants boursiers du Gabon en France. Il est doctorant en histoire des mentalités dans le monde antique de l’Université Paris-Sorbonne et membre de l’association des historiens de la Sorbonne.

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Info241 : Bonjour M. Yebe, pouvez vous nous présenter la situation des étudiants boursiers du Gabon en France ?

Yebe Kombila : La question liée aux bourses est aujourd’hui une problématique sérieuse qu’il importe de porter plus haut, auprès des autorités de ce pays qui semblent peut-être ne pas avoir conscience de l’impact de cette situation dans le quotidien de l’étudiant gabonais boursier de France. En effet, la situation est aujourd’hui traumatisante. Ce traumatisme témoigne d’ailleurs de l’état de mendicité pour lequel nous en sommes réduits.

Nous recevons des lettres d’avertissements d’expulsion de logement... Nous ne nous alimentons plus. Les comptes bancaires ont été bloqués..."

À Paris, comme un peu partout, nous recevons des lettres d’avertissements d’expulsion de logement, certains ont déjà même eu des préavis. Nous n’arrivons plus à nous acquitter de frais de transport pour fréquenter nos universités et laboratoires. Nous ne nous alimentons plus. Les comptes bancaires ont, pour la majorité d’étudiants, été bloqués pour cause de dépassement de plafonds autorisés par les banques. Les factures de chauffage et d’électricité ont pris des proportions vertigineuses : c’est un vrai traumatisme qui aura d’ailleurs et sans doute un impact sur les résultats généraux de fin de trimestre et ou semestre pour ces étudiants.

Au moment où nous faisons cet entretien (samedi 30 décembre, ndlr), je puis vous dire que Campus France, organe qui assure le pont entre l’ANBG et nous, ne dispose même plus d’informations à ce sujet et ne veut plus communiquer, puisque elle ne sait pas où se trouve le status questionis.

Quelles sont les raisons avancées par le gouvernement pour justifier cette situation inédite ?

Yebe Kombila : Nous ne savons réellement pas les causes d’une telle faiblesse puisqu’elles ne sont pas données clairement. Au cours notre rencontre avec le consul général, ce dernier nous a fait savoir que le pays avait des petites difficultés financières pour faire face à la question.

Le consul général nous a fait savoir que le pays avait des petites difficultés financières... Du coté de Campus France, on nous parle d’un problème de devise liée aux banques."

Du coté de Campus France, on nous parle d’un problème de devise liée aux banques. En revanche, du coté de l’ANBG, on évoque la thèse des fonds insuffisants. Tout cela reste quand même ambigu alors que nous savons qu’il n’y a pas longtemps en Allemagne et au Maroc, la question a été résolue, du moins partiellement.

Avez-vous procédé à un recensement des cas les plus critiques ? Combien sont-ils ? Pouvez-vous nous donner un exemple ?

Yebe Kombila : Oui, évidement ! La coordination étudiante a recensée près de 567 étudiants en situation d’extrême urgence. Par exemple à Saint-Etienne, nous avons deux étudiants dont la Faculté était obligée d‘apporter une aide en produits de première nécessité. A Lyon 3, des étudiantes ont été secourues par les Resto du cœur. Il y a plein d’exemples de ce genre.

Je reçois de la part des compatriotes des pleurs. J’ai mal, très mal."

J’ai d’autant plus mal pour ces étudiants qui arrivent à peine en France. Je sais dans quel état psychologique ils vivent. Il est mieux de souffrir chez soi, mais pas en pays étranger de surcroît en France, société capitaliste dans laquelle tout se vend et s’achète. Je reçois de la part des compatriotes des pleurs. J’ai mal, très mal.

Le Gabon entend être émergent dans 6 prochaines années. Le pourra t-il en traitant ainsi ses étudiants ?

Yebe Kombila : L’émergence béatement et hâtivement chantée par les chantres de son souhait est une utopie pour l’instant. Soyons lucide et réaliste. J’ai l’impression que la notion prestigieuse d’intellectuel est aux antipodes de ce qu’elle est censée être et dire sous nos cieux.

Ali Bongo a dépensé au moins 200.000 euros pour se faire acclamer lors de son passage à Paris alors que vos bourses ne sont pas payées. Un commentaire ?

Yebe Kombila : Je ne pourrais affirmer ce que vous affirmez et je ne souhaite pas en parler. J’en laisse le soin aux politiques.

Un mot de fin ?

Yebe Kombila : J’invite nos compatriotes étudiants boursiers de France à nous rejoindre pour une manifestation pacifique devant le siège de l’ambassade du Gabon dans l’optique nous faire entendre. Même si nous savons à la base qu’ils savent ce que nous subissons. Nous n’avons pas de choix. C’est triste, mais c’est ainsi.

Cette grève n’est pas un mouvement politique, elle est loin de l’être à la lettre et à l’esprit."

Je tiens fondamentalement à préciser que cette grève n’est pas un mouvement politique. Elle est loin de l’être à la lettre et à l’esprit. Il s’agit simplement d’une revendication étudiante. Que les spécialistes de la récupération tous azimuts et de l’interprétation absurde s’en abstiennent donc, surtout dans le contexte politique rigide que nous connaissons tous. Je tiens vraiment à le préciser.

Propos recueillis par Jeanne Bouanga

@info241.com
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