Ali Bongo renonce à toute vie politique au Gabon, un an après la chute de son régime
Quelque un an après la chute de son pouvoir, Ali Bongo a publié ce mercredi, une lettre d’adieu politique adressée au peuple gabonais. Cette prise de parole intervient après que le coup d’État militaire du 30 août 2023 a mis fin à son règne, marquant la fin de 56 années de domination de la famille Bongo sur le Gabon. Une lettre de renonciation à la politique qu’il semble avoir écrite pour obtenir la libération de sa femme et son fils qu’il a présentés comme innocents et victimes de la vengeance de nouvelles autorités. Ce qui ne manquera pas de faire réagir.
« Ces évènements ont porté au pouvoir un dispositif de transition », a écrit Ali Bongo dans sa lettre qui aurait été authentifiée par l’un de ses avocats, évoquant une période d’incertitude qui devrait aboutir à des élections pour « engager notre pays sur une nouvelle voie ». Dans ce texte empreint de gravité, il reconnaît que, malgré ses efforts, il n’a pas réussi à réformer un système qui s’est retourné contre sa famille. « J’ai cru, longtemps, pouvoir changer un système qui s’est finalement retourné contre une famille, symbole d’une époque », confesse-t-il. Il affirme comprendre la volonté des Gabonais de passer à une nouvelle ère et de choisir de nouveaux dirigeants lors des élections prévues dans le cadre de la transition en cours.
Renoncement à toute avenir politique au Gabon
Il assure qu’il ne nourrira plus aucune ambition politique, une décision qu’il prend également au nom de son épouse, Sylvia Bongo, et de son fils, Noureddin Bongo Valentin. « Je réaffirme mon retrait de la vie politique et le renoncement définitif à toute ambition nationale. Cela vaut également pour Sylvia et Noureddin », précise-t-il. Ali Bongo, en exil intérieur, revient longuement sur la situation de sa famille. Sylvia et Noureddin, tous deux emprisonnés depuis plus d’un an, seraient, selon lui, les victimes d’un système en quête de bouc-émissaires.
L’ancien président quelques jours avant sa chute
Il décrit leur détention comme une injustice et appelle les nouvelles autorités à mettre un terme à ces « violences et tortures ».Et d’ajouter : « J’en appelle à l’apaisement, à l’arrêt des violences et des tortures intentées contre ma famille, plus particulièrement mon épouse Sylvia et mon fils Noureddin », écrit-il, insistant sur le fait qu’ils n’ont jamais été reconnus coupables des faits qui leur sont reprochés.
Sa famille en détresse
L’ancien président exprime également sa propre détresse, se disant soumis à des restrictions de déplacement et à une surveillance étroite. Isolé, il déclare ne pas pouvoir communiquer librement avec ses proches et déplore l’absence de contacts réguliers avec ses enfants. « Moi-même, je demeure non libre de mes déplacements et soumis à surveillance quotidienne », confie-t-il. Cette situation, affirme-t-il, va au-delà de ce que sa famille mérite de supporter et contraste avec le respect des droits humains qu’il appelle de ses vœux pour le Gabon.
Dans sa lettre, Ali Bongo assume la responsabilité des insuffisances de son régime, particulièrement sur les plans social et institutionnel. Il admet que, malgré certaines réalisations, de nombreux Gabonais continuent de souffrir, une réalité qu’il qualifie de son plus grand regret. « Je suis pleinement conscient de ce qui a été accompli sous ma présidence, comme également des insuffisances dont j’assume seul la responsabilité », écrit-il, ajoutant que cette souffrance nationale reste son « plus grand regret ».
Imploration finale
Ainsi Ali Bongo appelle à la réconciliation nationale, implorant les autorités actuelles et le peuple gabonais de rejeter la vengeance et de construire un avenir apaisé. « Aussi, j’appelle mon pays, ses dirigeants et mes concitoyens à renoncer à la vengeance et à écrire sa prochaine Histoire avec harmonie et humanité », termine-t-il dans cet ultime appel à l’unité, laissant en suspens l’avenir judiciaire de sa famille et les défis de la transition en cours au Gabon.
Voici l’intégralité de cette lettre adressée au Gabon :
Gabonaises. Gabonais. Chers compatriotes
Le soir du 29 août 2023 a mis tin à l’exercice de mon mandat de Chef de l’État dans des circonstances douloureuses.
Ces évènements ont porté au pouvoir un dispositif de transition, qui, ces prochains mois, se confrontera aux urnes et au vote pour engager notre pays sur une nouvelle voie. Les Gabonaises et les Gabonais, auront, à cette occasion, l’opportunité d’élire leur Président de la République.
Conscient qu’une évolution était nécessaire pour améliorer la vie de nos concitoyens, j’ai cru, longtemps, pouvoir changer un système qui s’est finalement retourné contre une famille, symbole d’une époque.
Ma femme et mon fils en sont aujourd’hui les bouc-émissaires impuissants. Notre pays en constitue le témoin, spectateur, espérant le légitime changement.
Pour ma part, je respecte et je comprends la volonté des citoyennes et des citoyens de souhaiter, pour construire l’avenir, de nouveaux responsables politiques et je tiens à réaffirmer mon retrait de la vie politique et le renoncement définitif à toute ambition nationale. Cela vaut également pour Sylvia et Noureddin.
L’idée que je me fais de mon devoir est de dire avec sincérité et honneur que je ne souhaiterai jamais constituer, pour le Gabon, un risque de menace, de trouble et de déstabilisation dans ce moment de reconstruction.
Parce que notre pays est, a toujours été et sera toujours un pays d’honneur, j’en appelle à l’apaisement, à l’arrêt des violences et des tortures intentées contre ma famille, plus particulièrement mon épouse Sylvia et mon fils Noureddin et à leur libération, car depuis trop longtemps désormais emprisonnés pour des faits dont ils n’ont pas été reconnus coupables, bouc-émissaires d’une situation qui va bien au-delà de leur personne.
Je leur ai imposé, tout au long de la vie, bien des épreuves par mes choix. Mais leur emprisonnement et les sévices qu’ils subissent depuis plus d’une année vont bien-au-delà de tout ce qu’une épouse et un fils ont à supporter.
Moi-même, je demeure non libre de mes déplacements et soumis à surveillance quotidienne. Mes visites dépendent de l’autorisation des militaires. Isolé du monde extérieur sans communications, sans nouvelles de ma famille.
Je suis pleinement conscient de ce qui a été accompli sous ma présidence, comme également des insuffisances dont j’assume seul la responsabilité, tant sur le plan social que s’agissant du fonctionnement de nos institutions. Mais ce bilan aussi sincère que douloureux ne saurait justifier que tant d’abus soient perpétrés contre ma femme et mon fils, qui n’a pas serré ses enfants dans les bras depuis plus d’un an. Je connais trop les Gabonais pour savoir qu’ils savent la différence entre justice et vengeance.
J’insiste sur ce point, seul Président et responsable de mes décisions, je comprends que malgré les réalisations effectuées sous mes mandats, trop de Gabonais souffrent encore et cela reste mon plus grand regret. Je souhaite de tout cœur que nous soyons en mesure de tourner la page de cette souffrance intime et nationale. Avec un seul et unique but : notre réconciliation nationale.
Aussi, j’appelle mon pays, ses dirigeants et mes concitoyens à renoncer à la vengeance et à écrire sa prochaine Histoire avec harmonie et humanité.
Que Dieu vous bénisse.
Que Dieu bénisse notre patrie le Gabon.
Ali Bongo Ondimba
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