Vie politique

Conseil national de la démocratie, l’éternelle coquille vide du rêve démocratique du Gabon

Conseil national de la démocratie, l’éternelle coquille vide du rêve démocratique du Gabon
Conseil national de la démocratie, l’éternelle coquille vide du rêve démocratique du Gabon © 2021 D.R./Info241

Alors que l’actualité politique est particulièrement dense ces derniers temps, une des institutions qui aurait dû se trouver au centre des grands débats de l’heure reste curieusement fantomatique. Le Conseil national de la démocratie (CND), né des cendres du monopartisme pour justement jouer le rôle d’organe évaluateur des principes démocratiques, il se retrouve totalement absent des grandes questions s’y rapportant et qui engagent la vie de la nation. À quoi tient donc encore son maintient ?

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La gouvernance politique du Gabon semble être résolument tournée vers son passé pourtant très peu glorieux. Et c’est parce qu’à l’unanimité, les acteurs politiques des années d’avant 1990 avaient estimé qu’il devenait impérieux de s’arrimer à la marche des peuples civilisés, qu’une conférence nationale fut organisée en 1990. Au sortir de celle-ci, plusieurs résolutions furent adoptées. Au nombre desquelles, la démocratisation du Gabon avec tout ce que cela comporte.

Un vœu pieux toujours pas abouti

Entre autres, le multipartisme qui incluait d’emblée la pluralité des opinions ainsi que la mise en place d’un certain nombre d’organes dont le Conseil national de la démocratie (CND). Cet organe, comme sa dénomination l’indique, avait vocation à veiller au respect strict des règles démocratiques préalablement établies par les parties. Mais aussi, à s’assurer de la vitalité de cette démocratie obtenue au prix d’énormes concessions faites de part et d’autres, entre un pouvoir incarné par Omar Bongo qui était dos au mur et une opposition déchaînée, incarnée notamment par le père Paul Mba Abessole.

Seulement voilà. Trente ans après la mise en place de cet organe, force est de constater qu’en terme de progrès démocratique, le Gabon, s’il n’est pas resté au point de départ, nonobstant certaines apparences pour se voiler la face, a plutôt reculé. Et le conseil national de la démocratie avec lui.

Un échec cuisant

Pour s’en convaincre, il suffit de prendre deux faits majeurs de ces derniers temps. En décembre 2020, le gouvernement, aussi curieux que cela paraisse, annonçait au cours d’un communiqué final de conseil des ministres qu’il entendait proposer une modification constitutionnelle au parlement. Le 30, du même mois, sans débat contradictoire, sans se référer au peuple au moyen d’un référendum pour une réforme constitutionnelle de cette ampleur, puisqu’impliquant plus de vingt articles et non des moindres, le parlement, pouvoir législatif, votait ladite modification sous la menace du pouvoir exécutif sur le dos du peuple. Au niveau du CND, même pas une simple consultation.

Il y a plus de deux semaines, le Gabon a organisé l’élection qui renouvelle la chambre haute du parlement. Une des innovations de ce scrutin sans suspens, a été le fait qu’il est désormais des pouvoirs d’Ali Bongo de nommer 15 des 67 sénateurs qui siègeront au sein de cet hémicycle. Avancée ou recul démocratique ? Une fois encore, le CND fut complètement ignoré. Son avis ne compte que pour du beurre, de toutes les façons. Même la simple possibilité pour lui de déployer des observateurs aux côtés des membres de commissions du Centre national des élections (CGE) lui a été ôtée.

Une coquille institutionnelle véritablement vide

Face à ce traitement, ils sont plusieurs observateurs à se demander à quoi sert finalement le CND. Ou plus inclusivement, que sont devenus les acquis de la Conférence nationale qui traçait durablement les traces sur lesquelles le Gabon allait résolument cheminer vers sa longue marche vers cet idéal de vie moderne tant rêvée par l’immense majorité de son peuple ?

Depuis 30 ans aujourd’hui, chaque élection locale et législative est quasi à sens unique avec une rengaine post-électorale connue d’avance. Chaque élection présidentielle donne lieu à des violences post électorales d’une ampleur chaque fois plus étendue. Ceci du fait de la trop grande faiblesse des institutions devant accompagner le processus électoral de bout en bout au Gabon.

Une mise à mort entretenue

Mais cette mise à l’écart de cette institution que préside Me Séraphin Ndaot Rembogo ne date pas d’aujourd’hui. Du 26 février au 3 mars 2020, lors des travaux comptant pour la première session ordinaire de son assemblée plénière, ouverts par l’ancien Premier ministre Julien Nkoghe Bekale, les difficultés auxquelles fait face cette maison se faisaient clairement voir tout au long des travaux. Entre plusieurs mois d’arriérés de salaire pour le petit personnel affecté là-bas, le budget de fonctionnement quasi inexistant et justement la non implication de celle-ci en temps indiqués, il apparaissait déjà clairement qu’à défaut de sa suppression pure et simple, le CND survie.

Mais pour combien de temps encore cette institution va t-elle exister en sursis ? Un observateur de la vie publique au Gabon qui a requis l’anonymat croit tenir une réponse : « Je crois que le CND est l’exemple le plus achevé de toutes ces institutions que le gouvernement traîne maintenant avec lui comme un vrai boulet. À l’image du Sénat d’ailleurs, il leur prive volontairement de leurs moyens mais en les gardant quand même là tels des épouvantails qu’il présente à la communauté internationale pour se donner bonne conscience. Ainsi, autant il peut continuer à crier que le Gabon est un État de droit en violant chaque jour les droits les plus élémentaires du peuple. Il peut allègrement continuer à brandir le Gabon comme cette éternelle jeune démocratie qui ne grandit jamais en pointant du doigt ce type d’institution qu’est le CND  ».

@info241.com
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