Maître chanteur

Kris O’Bryan, son faux « grand » de la DGSS et les 12 pots de savon de drogue qui valaient 500 millions

Kris O’Bryan, son faux « grand » de la DGSS et les 12 pots de savon de drogue qui valaient 500 millions
Le beatmaker et la victime qu’il faisait chanter pour de la drogue du cartel de Socrate © 2025 D.R./Info241

On en sait désormais plus sur l’implication du beatmaker Kris O’Bryan, de son vrai nom Arsène Baba, dans le vaste scandale du cartel de Socrate exilé au Ghana mêlant drogue, escroquerie et usurpation d’identité. Interpellé par la Direction générale des services spéciaux (DGSS, renseignements présidentiels gabonais) et l’Office central de lutte antidrogue (Oclad), le producteur musical est accusé d’avoir orchestré un scénario de chantage autour d’une cargaison de 12 pots de savon contenant de la drogue d’une valeur estimée à 500 millions de francs CFA. C’est cette affaire de chantage qui aura permis d’arrêter une grande partie des complices du cartel à Libreville en fin de semaine dernière.

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Le point de départ : une opportunité transformée en piège

Selon les informations de Gabon 24, tout commence lorsqu’O’Bryan apprend qu’une jeune femme, Tricia, compagne et mère du fils de Socrate, détient les fameux 12 pots de savon. Convaincu d’avoir découvert une aubaine, il élabore un plan visant à tirer profit de la situation. Se présentant comme le frère d’un agent des services spéciaux, il fait croire à Tricia qu’elle est recherchée par la DGSS et qu’elle risque de « disparaître » si elle ne coopère pas. Des 12 pots, il ne s’agira finalement que de 9.

La petite amie et mère du fils de Socrate racontant les faits à la presse

Le beatmaker a admis son stratagème : « J’ai inventé l’affaire pour lui faire peur ». Sous la menace et la peur, Tricia finit par lui remettre plusieurs des pots contenant la drogue, persuadée qu’elle est surveillée par les autorités judiciaires. «  Il m’a dit que si les agents me trouvaient, ils allaient me tuer au Cap. J’ai eu peur, j’ai pleuré  », a-t-elle raconté dans une capsule vidéo de Gabon 24, décrivant un climat de terreur psychologique soigneusement entretenu par le musicien.

Le musicien devenu maître chanteur

Pour faire tenir son manège, Kris O’Bryan créera un faux compte WhatsApp, invente des conversations avec un soi-disant agent de la DGSS et envoie de fausses captures d’écran à Tricia pour renforcer son mensonge. « J’ai mis un deuxième WhatsApp dans le téléphone, pour faire croire que je parlais à mon grand  », a-t-il reconnu devant les enquêteurs. À mesure que la supercherie prenait forme, il s’improvisait négociateur entre Tricia et le supposé “agent”, exigeant au passage de l’argent pour “arranger la situation”.

Le beatmaker dans la nasse judiciaire

Il parvient ainsi à soutirer près d’un million de francs CFA, tout en gardant un pot de drogue pour lui, croyant pouvoir en tirer un bénéfice plus important. Mais dans son double jeu, O’Bryan sous-estime la vigilance du cartel de Socrate, dont les ramifications s’étendent au Ghana et au Gabon.

Le réseau du Ghana et la panique du cartel

Selon l’enquête de l’Oclad, les 12 pots appartenaient à un réseau ghanéen d’importation de cocaïne et de méthamphétamine, dirigé par Socrate et ses associés gabonais qui eux aussi ont été arrêtés. Tricia n’était qu’un maillon intermédiaire chargé de la conservation du stock. En apprenant que la marchandise a été déplacée, Socrate panique et entre en contact avec O’Bryan par l’intermédiaire d’une tierce personne, Medeline, pour tenter de récupérer la cargaison.

Les deux cerveaux du cartel : Socrate et Medeline en fuite au Ghana

« Quand Socrate m’a appelé, il pleurait. Il disait : “Ce n’est pas ma marchandise. Ils vont me tuer... l’enfant ne verra pas son père”  », raconte Tricia, encore émue et en panique. Face à la pression du réseau, O’Bryan prétend négocier avec son « grand » des services spéciaux, jouant la carte du médiateur pour gagner du temps. En réalité, il ne cherchait qu’à garder l’argent et la drogue.

Le retournement de situation

Le plan s’effondre lorsque Socrate et ses complices découvrent finalement la supercherie et exigent la restitution de la drogue et des fonds. Pris de peur, Kris O’Bryan contacte un véritable agent de la DGSS, croyant se protéger en dénonçant le trafic. Mais cet appel maladroit déclenche la méfiance des services de renseignement. Les enquêteurs de la DGSS et de l’Oclad découvrent rapidement la manipulation, les faux messages et les enregistrements truqués.

Le pot restant saisi sur le beatmaker

Pris en étau, O’Bryan est arrêté à Libreville avec un pot de savon encore intact et plusieurs traces de transferts d’argent. Lors de son interpellation, il tentera de minimiser les faits : « Je voulais juste arranger la situation », déclare-t-il. Mais face à la masse de preuves, il sera inculpé pour possession de stupéfiants, escroquerie, usurpation de fonction, abus de confiance et association de malfaiteurs.

Le show-biz dans la tourmente

Cette implication a provoqué une onde de choc dans le milieu artistique gabonais. Kris O’Bryan, connu pour ses collaborations avec L’Oiseau Rare, 2MJ, ou encore Fetty Ndoss, était jusqu’ici considéré comme un jeune prodige du beatmaking. Les enquêteurs ont toutefois établi que le producteur évoluait déjà dans un environnement trouble, entre consommation de stupéfiants et fréquentations liées au trafic de drogue.

Les investigations de l’Oclad se poursuivent pour identifier d’éventuels complices et retracer le circuit complet de la marchandise venue du Ghana. En attendant, Kris O’Bryan est détenu à la prison centrale de Libreville, où il médite sur la chute brutale d’une carrière prometteuse. Ce scandale illustre la porosité inquiétante entre le monde du divertissement et les réseaux criminels, et confirme, selon un enquêteur de l’Oclad, « qu’aucun secteur, pas même celui de la culture, n’est à l’abri de l’emprise du narcotrafic  ».

@info241.com
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