Disparition

Mort du major Mbegha Allou en Guinée équatoriale : 14 ans après, le Gabon n’a toujours pas rendu justice à son soldat

 Mort du major Mbegha Allou en Guinée équatoriale : 14 ans après, le Gabon n’a toujours pas rendu justice à son soldat
Mort du major Mbegha Allou en Guinée équatoriale : 14 ans après, le Gabon n’a toujours pas rendu justice à son soldat © 2025 D.R./Info241

Près de 14 ans ce samedi après la mort tragique de l’adjudant-chef major Thomas Mbegha Allou, survenue le 8 novembre 2011 en Guinée équatoriale, le mystère demeure entier. Ce militaire gabonais, alors en service à la deuxième région militaire d’Oyem (Woleu-Ntem), avait traversé la frontière pour assister aux funérailles d’une nièce dans le village équato-guinéen d’Ebeng. Quelques jours plus tard, sa famille apprenait, dans la confusion la plus totale, son décès dans des circonstances jamais élucidées.

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Le gouvernement gabonais de l’époque avait confirmé le décès de l’officier à travers un communiqué lu le 6 décembre 2011 et repris par le quotidien L’Union le lendemain. Mais depuis, aucune enquête publique, aucun rapport diplomatique, ni restitution de la dépouille n’ont permis à la famille d’organiser ses obsèques. Un silence pesant qui, de 2011 à 2025, continue d’alimenter l’amertume et l’incompréhension des proches.

Une affaire devenue diplomatique… puis étouffée

Selon Ben Essono, l’un des fils du disparu, rencontré lors d’un entretien accordé en novembre 2023, la famille avait immédiatement saisi les autorités locales d’Oyem, avant que le dossier ne soit porté à la connaissance du gouvernement. « Le gouvernement nous avait demandé d’attendre les résultats de l’enquête dans le calme. Mais nous avons attendu de 2011 à 2022, sans aucune suite  », confiait-il alors.

Récapitulatif des principaux éléments de l’affaire Thomas Mbegha Allou :

Élément Détails
Nom complet Adjudant-chef major Thomas Mbegha Allou
Grade et fonction Militaire de l’armée de terre gabonaise, en service à la 2e région militaire d’Oyem (Woleu-Ntem)
Anciennes fonctions Ancien directeur de l’École nationale de la magistrature (ENM) , structure de formation des magistrats, greffiers et auxiliaires de justice
Date de disparition 8 novembre 2011
Lieu du drame Village Ebeng , Guinée équatoriale
Motif du déplacement Participation aux funérailles d’une nièce en Guinée équatoriale
Circonstances de la mort Décès annoncé par le gouvernement gabonais le 6 décembre 2011 , mais jamais élucidé
Corps restitué à la famille Non , la dépouille n’a jamais été rapatriée
Communiqué officiel Confirmé par le gouvernement gabonais et publié dans L’Union le 7 décembre 2011
Famille en attente de réponses depuis 14 ans (2011–2025)
Principales démarches entreprises Saisines du gouverneur d’Oyem , du ministère de la Défense , du Premier ministre , du ministre de l’Intérieur , et de la Présidence de la République
Réponse des autorités Aucune suite concrète ; dossier qualifié de « problème diplomatique » entre le Gabon et la Guinée équatoriale
Soupçons exprimés par la famille Existence possible d’un arrangement entre le régime Bongo et le pouvoir de Malabo
État actuel du dossier (2025) Toujours non élucidé ; la famille demande au président Brice Clotaire Oligui Nguema de relancer le dossier
Souhaits de la famille Rapatriement du corps, reconnaissance officielle et organisation des obsèques nationales
Années d’attente 14 ans sans justice ni sépulture

Les démarches entreprises auprès du Premier ministre, du ministre de la Défense, de l’Intérieur et des Affaires étrangères de l’époque étaient restées sans réponse concrète. Les autorités gabonaises avaient évoqué un dossier « d’ordre diplomatique » entre Libreville et Malabo. D’après la famille, les autorités équato-guinéennes n’ont jamais transmis de rapport officiel ni autorisé le rapatriement du corps. Un silence perçu comme un possible arrangement entre le régime déchu d’Ali Bongo et celui de Teodoro Obiang Nguema.

Quatorze ans de deuil suspendu

De 2011 à 2025, la famille Mbegha Allou vit dans le flou et la douleur. Aucun des fils du défunt n’a pu se rendre en Guinée équatoriale faute de moyens, et la disparition du corps empêche toujours la tenue des obsèques. «  Depuis quatorze ans, beaucoup d’entre nous n’arrivent pas à dormir. On ne peut pas faire le deuil d’un père dont on ignore où repose la dépouille  », déplore Ben Essono.

Au fil des ans, les correspondances adressées à la présidence et aux ministères compétents sont restées lettre morte. Pour les proches, l’inaction des gouvernements successifs symbolise l’indifférence d’un État envers l’un de ses soldats morts en territoire étranger.

Un appel au président Oligui Nguema

Avec l’avènement de la Cinquième République et l’accession du général Brice Clotaire Oligui Nguema à la tête du pays, la famille espère enfin un dénouement. «  Nous plaçons notre espoir dans le président Oligui Nguema. Il doit faire la lumière sur cette affaire, obtenir le rapatriement du corps et permettre à la famille d’enterrer notre père dans la dignité  », lance le fils du défunt.

Le nouveau pouvoir, engagé depuis 2023 dans une politique de restauration de la dignité nationale et militaire, pourrait faire de ce dossier un symbole fort de justice et de réconciliation diplomatique. Car au-delà du drame humain, le silence autour de la mort du major Mbegha Allou interroge sur la fragilité des relations bilatérales entre le Gabon et la Guinée équatoriale, marquées par des décennies de méfiance.

Une affaire d’État à rouvrir ?

Quatorze ans après les faits, la mémoire du major Thomas Mbegha Allou reste vive dans les rangs de l’armée gabonaise. Ancien directeur de l’École nationale de la magistrature (ENM), il incarnait la discipline, le devoir et la loyauté. Sa disparition dans des conditions troubles demeure une blessure nationale.

Alors que le pays célèbre les promesses d’un renouveau institutionnel sous la Cinquième République, la famille Mbegha Allou attend un geste : la restitution du corps et la reconnaissance officielle du sacrifice de ce militaire tombé loin de sa terre.
Car, quatorze ans après, le silence de l’État continue de faire plus mal que la mort elle-même.

@info241.com
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